Qu’arrive-t-il quand une pandémie fait surface subitement et bouscule toutes nos habitudes, incluant celles liées à notre alimentation? L’Institut national de la santé publique du Québec s’est penché sur la question.
Insécurité alimentaire et covid-19
On définit la sécurité alimentaire comme un état selon lequel un individu a accès à une saine alimentation lui permettant d’atteindre un état de santé optimal et ce, en tout temps et dans la dignité1. On pourrait penser que dans un pays développé comme le Canada, tous et chacun mangent à leur faim. Or, en 2017 et 2018, la proportion des ménages canadiens vivant une situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave s’élevait à 8,8% (environ 1,2 million de ménages)2. Ainsi, plusieurs canadiens et canadiennes n’avaient pas accès à une alimentation adéquate en termes de quantité et de qualité (insécurité alimentaire modérée), alors que d’autres ont dû réduire leurs apports alimentaires pour des raisons financières (insécurité alimentaire grave)2.
Si certains québécois et québécoises n’avaient pas les moyens de manger à leur faim au courant des dernières années, force est de constater que la crise sanitaire dans laquelle la planète est plongée depuis mars 2020 n’aidera pas à cette situation alarmante. En effet, c’est ce que les données de l’Institut national de santé publique du Québec nous démontrent. Les résultats de questionnaires web envoyés à un échantillon de 1000 québécois pendant la période du 21 mars au 31 mai 2020 ont permis de démontrer que 26% des ménages québécois vivaient de l’insécurité alimentaire* au début de la pandémie et que cette proportion diminuait à 15% au 20 mai 20203. Bien que ces résultats aient été obtenus au début de la pandémie, il est certain que la répercussion des mesures sanitaires sur le portefeuille des québécois et québécoises se fera sentir pour plusieurs mois encore. Les banques alimentaires du Québec ont d’ailleurs vu une augmentation de la demande d’aide alimentaire depuis le début de la pandémie, soit une augmentation de 30 à 40% de l’aide alimentaire selon les régions4. En avril 2020, en plein cœur de la première vague, les banques alimentaires ont distribué 50% plus de denrées qu’à la même période l’année précédente4.
Le paradoxe du gaspillage alimentaire et de l’insécurité alimentaire
Comme Sauve ta bouffe le souligne depuis plusieurs années, le gaspillage alimentaire est un fléau mondial qui a des impacts environnementaux, économiques et sociaux. Sur le plan social, il semble insensé que d’une part, autant de nourriture propre à la consommation soit jetée mondialement et que d’une autre part, autant de gens ne mangent pas à leur faim. Dans le contexte actuel, la lutte au gaspillage alimentaire est importante plus que jamais.
Qu’est-ce que je peux faire pour aider?
Plusieurs actions simples peuvent être posées pour limiter le gaspillage alimentaire et aider les personnes vulnérables à manger à leur faim. Tout d’abord, limiter le gaspillage alimentaire à la maison demeure une priorité. Cependant, si vous pensez perdre un aliment et le gaspiller, pensez aux frigos communautaires de votre quartier pour aller le déposer et faire une personne heureuse. De plus, lorsque vous cuisinez une recette avec un grand volume de production, pourquoi ne pas aller distribuer quelques portions de ce repas dans un de ces frigos communautaires? Vous éviterez de vous lasser de manger le même repas toute la semaine et éviterez donc de le gaspiller, tout en permettant à quelqu’un de se nourrir d’un bon repas. Ensuite, si vous avez envie de vous impliquer d’avantage, plusieurs initiatives locales recherchent des bénévoles motivé(e)s. Notamment, les banques alimentaires, les organismes offrant des distributions alimentaires, ainsi que les cuisines solidaires de la Tablée des chefs sont constamment à la recherche de bénévoles pour les aider à réaliser leur projet de production et de distribution de repas et de denrées à travers la province. Finalement, faire un don en denrées ou en argent aux différentes banques alimentaires du Québec est un geste simple à poser mais qui aura un impact concret et important sur l’atteinte de la sécurité alimentaire des membres plus vulnérables de notre communauté. Pour faire un don ou vous impliquer dans votre région, n’hésitez pas à consulter le site Web du 211 ou à les contacter par téléphone en composant le 2-1-1.
En temps de crise, nous avons eu la chance de voir un mouvement de solidarité chez les québécois et québécoises qui a su inspirer différentes initiatives venant en aide aux plus vulnérables d’entre-nous. Ces initiatives devraient être maintenues dans le temps, même lorsque la pandémie sera derrière nous, puisqu’elles contribuent à la réduction des inégalités sociales de santé dans notre communauté et donc, contribuent à un avenir meilleur pour l’ensemble du Québec.
Références
- Tarasuk V. Document de travail sur l’insécurité alimentaire individuelle et des ménages. Ottawa: Santé Canada; 2001.
- Statistique Canada. Feuillet d’information sur la santé. L’insécurité alimentaire des ménages, 2017-2018. En ligne : https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/82-625-x/2020001/article/00001-fra.htm
- Institut national de santé publique du Québec. COVID-19 : Pandémie et insécurité alimentaire. En ligne : document PDF.
- Les banques alimentaires du Québec. Rapport d’étape COVID-19 de mars à juin 2020. En ligne : https://www.banquesalimentaires.org/wp-content/uploads/2020/09/BAQ_rapport_etape_covid_VFINAL.pdf
*Dans ce rapport de l’Institut national de santé publique du Québec, l’insécurité alimentaire marginale est aussi comprise dans les statistiques d’insécurité alimentaire totale.
Camille Dugas, Dt.P.,
Bénévole Sauve ta bouffe